Ex-Clemenceau. La bataille juridique traverse la Manche
Alors que la procédure juridique s’est éteinte, hier soir, côté anglais, les Brestois de l’association Agir pour l’Environnement et le Développement Durable (AE2D) reprennent le flambeau pour trois raisons. La justice anglaise
a validé l’autorisation d’importation du navire pollué.
Côté anglais, l’ex-Clemenceau est donc autorisé
à accoster à Hartlepool. Mais la partie se poursuit
en France. Le dossier défendu par maître David Rajjou
au nom de l’association AE2D est prêt. Il est sur le point d’être
déposé au tribunal administratif de Rennes pour un recours
en référé-suspension. L’association vise l’autorisation
d’exportation du navire-déchet vers l’Angleterre. Dans un premier
temps, ils doivent apporter la preuve au tribunal qu’il y a bien un
caractère d’urgence et d’exception dans leur recours. Une fois
leur recours introduit, le jugement intervient dans les 24 à
72 heures. Il peut faire l’objet d’un appel examiné par la
cour administrative d’appel de Nantes, rendu dans un délai
de deux à quatre semaines. Mais pourquoi prolonger la guérilla
juridique ? Christian Bucher, l’un des porte-parole de l’association
AE2D, avance trois raisons. |
![]() Toujours pas parti, le bon vieux Clem’. Une association brestoise prend le relais des opposants britanniques. (Photos d’archives Le Télégramme) |
Ce
qu’ils en pensent
L’association AE2D affiche déjà dix années d’activité
autour des questions d’environnement. Son représentant pour le dossier
du démantèlement n’est pas tendre quant à l’implication
des politiques qui, selon lui, ont capitulé sur cette question. «
Il y a eu des intentions affichées, mais pas grand-chose pour défendre
le démarrage d’une filière pourtant garante d’emplois dans notre
secteur ». Au passage, l’association Robin des Bois, pourtant très
en pointe sur le sujet, en prend également pour son grade. «
En soutenant la solution Able, sans prendre en compte le combat et les préoccupations
des associations environnementales locales, Robin des Bois s’est complètement
discréditée », appuie Christian Bucher.
Robin des Bois : l’arbre qui cache la forêt...
Au nom de l’association Robin des Bois, Jacky Bonnemains ne comprend pas cet
acharnement juridique. Pour celui très au fait des questions de démantèlement
des navires en fin de vie, le choix du chantier Able en Angleterre est la
solution la plus raisonnable et, en tout cas, la plus disponible dans le contexte
actuel. Jacky Bonnemains veut faire confiance à ce chantier anglais
et veut surtout voir s’engager une dynamique « au lieu de faire traîner
les choses et de voir des milliers de navires partir chaque année dans
des pays et des chantiers sans foi ni loi ». Renvoyant la balle à
AE2D, il se demande pourquoi l’association brestoise ne dépense pas
autant d’énergie pour déconstruire à Brest des bateaux
de moins grande taille mais bien plus urgents à déconstruire,
vu leur état (le Winner, la Reine-des-Abers, etc.). « Pourquoi
focaliser sur un navire où l’État s’efforce de bien faire son
travail, comme aucun autre bateau n’en a bénéficié ?
», enfonce-t-il.
Mor Glaz : 100 % solidaire
L’association Mor Glaz et son porte-parole, Jean-Paul Hellequin, soutiennent
à 100 % l’initiative d’AE2D. « Nous partageons les mêmes
convictions et estimons que ce bateau ne doit pas rejoindre un chantier qui
a déjà été pris en faute par le passé ».
Ardent défenseur d’une véritable filière de déconstruction
à la pointe bretonne, Jean-Paul Hellequin soutient le combat de l’association
déboutée, qui se bat depuis plusieurs années contre la
venue des vieux navires à Hartlepool. « Dommage pour ces militants
qui se sont battus. Nous allons continuer à les informer de nos démarches,
car cette association compte sur nous, elle ne veut pas d’un déchet
qui peut être traité ici en France et, pourquoi pas, à
Brest ».
Des opposants anglais à bout de souffle
À bout de course, les écologistes anglais sont contraints de
jeter l’éponge. Après avoir épuisé tous les recours,
ils n’ont plus les moyens, non plus, de financer ce marathon juridique. Jean
Kennedy et Iris Ryder, de l’association « les Amis d’Hartlepool »,
auront tout fait pour éviter que ce « déchet mortel »
(en faisant référence aux tonnes d’amiante contenues dans la
coque) soit traité chez eux, « dans leur petite ville, au sein
de leur petite communauté ». En vain.
Stéphane
Jézéquel
Le
Télégramme - Brest - 14/11/2008