Caramba, l'herbe de la pampa mange sur la ville !
Cette plante du Chili est devenue un véritable fléau. Difficile à brûler, broyer ou enfouir, elle s'annonce coûteuse à éradiquer.
En quelques
années, le polder, entre Océanopolis et le port de commerce,
s'est transformé en une forêt de plumeaux. Joli ? Inquiétant
plutôt. La colonisation redouble. L'herbe de la pampa, ou Cortaderia
selloana, a débarqué d'Amérique du sud dans nos
jardins dans les années 1970-1980. |
Sur le polder, entre Océanopolis et le port de commerce. Chaque plant femelle peut contenir des millions de graines. |
En vente libre
BMO
en a arraché au tractopelle, puis retourné et enterré.
« On observe ce qui se passe », explique Jean-Christophe
Gautier, responsable de l'opération. Sur le polder, une partie a été
recouverte de gravats, ce qui pourrait poser des problèmes de stabilité
aux constructions futures. D'autres plants ont eu les racines sectionnées.
Certes, la touffe ainsi extraite est moins grosse mais que faire avec ? La
brûler ?
Testée,
l'usine d'incinération des déchets ménagers du Spernot
a toussé un peu. Elle pourra difficilement absorber les volumes en
question (des dizaines de milliers de mètres cubes). Les broyer ? Pour
quoi faire, du compost ? Encore faut-il être sûr de la température
du compostage et que les broyas ne vont pas bouturer un peu partout ensuite
dans les jardins où le compost sera épandu !
«
Pour l'instant, on ne sait pas quelle est la solution la plus efficace et
à un coût raisonnable », admet Jean-Christophe
Gautier, qui n'envisage pas d'action radicale avant deux ans. En attendant,
l'herbe de la pampa s'épanouit tous les jours un peu plus.
Une possibilité
serait de couper les plumeaux deux fois par an et de les incinérer
en sac poubelle pour éviter la dissémination de graines. Cela
suppose une coûteuse main-d'oeuvre. Et des résultats imparfaits.
Car des plants sont toujours en vente en jardinerie et tant qu'aucune obligation
de couper les plumeaux (par arrêté préfectoral par exemple
comme pour les chardons) n'est faite aux particuliers, les graines d'herbe
de la pampa voleront aux quatre vents.
Repères
Invasives Recensées |
Prisé pour les aquariums et mares de jardin, le myriophylle du Brésil est joli, mais invasif. |
Peu
de réglementation
Seule
la jussie, qui colonise les cours d'eau et étangs et pose de graves
problèmes de navigation notamment sur les canaux, a fini par être
interdite de commercialisation en mai 2007. Les autres sont en vente en jardineries
ou magasins d'aquariophilie. L'Etat plancherait de nouveau sur une liste.
Que
faire ?
D'abord,
ne pas en acheter et en planter. Quand elles sont là, les couper, les
sécher puis les brûler. Avant de vider un aquarium, bien enlever
les plantes, et les brûler ou les mettre à la poubelle d'ordures
ménagères (incinérées).
En
savoir plus
Une
exposition sur les plantes invasives du Finistère est en cours au Conservatoire
botanique national, vallon du Stang-Alar, pavillon d'accueil, mercredis et
dimanches, de 14 h à 17 h.
Des menaces sur la production d'eau potable
Trois questions à...Jean-Christophe Gautier, responsable des espaces naturels à Brest métropole océane.
L'herbe
de la pampa est très visible. Il y a pire ?
Les
espèces aquatiques comme la jussie ou l'élodée sont celles
qui nous inquiètent le plus car elles menacent la production d'eau
potable. Il y a deux ans, des crépines d'aspiration se sont bouchées
dans l'étang de Kerleguer. Derrière le Spernot, l'usine de Kerleguer
fournit 15 % de l'eau potable de BMO. L'étang était entièrement
colonisé.
On a arraché
la jussie. L'élodée, trop fine avec ses petits filaments, se
fauche. Il a fallu égoutter, broyer puis incinérer quelques
centaines de mètres cubes. La logistique est énorme. Les bennes
sont étanches et il faut les passer au balai pour éviter de
disséminer des bouts de plantes.
Quel
est votre pronostic pour la lutte contre les espèces invasives ?
On
n'arrivera jamais à éradiquer l'herbe de la pampa. Le but, c'est
de la maîtriser. À terre, il y a aussi la renouée du Japon,
en bords de routes. Elle peut pousser de 8 cm par jour ! Et prolifère
par bouturage et rizomes. La tache est immense. Dans les étangs, avec
la jussie et l'élodée, on sait faire. Mais on n'a vraiment pas
la logistique pour. Et ça repousse à toute vitesse. On devrait
quand même y arriver. C'est une question de temps et d'argent.
Quelle
est votre approche générale ?
Ne
pas foncer tête baissée. Le remède peut être pire
que le mal en favorisant la dissémination. Il faut se méfier
des recettes miracles qui vont coûter des millions. Nous sortons de
deux ans d'inventaire, avec le Conservatoire botanique et l'Institut de géoarchitecture.
Nous sommes dans une période d'échange, avec les autres collectivités.
Un observatoire régional des plantes invasives devrait être mis
en place.
Sébastien
PANOU.
Ouest-France - France - 22/01/2009